Main huitreuse le geste nacrée

La main, le premier outil de l’homme

L'huître

L'huître, de la grosseur d'un galet moyen, est d'une apparence plus rugueuse, d'une couleur moins unie, brillamment blanchâtre. C'est un monde opiniâtrement clos.

Pourtant, on peut l'ouvrir : il faut alors la tenir au creux d'un torchon, se servir d'un couteau ébréché et peu franc, s'y reprendre à plusieurs fois.

Les doigts curieux s'y coupent, s'y cassent les ongles : c'est un travail grossier. Les coups qu'on lui porte marquent son enveloppe de ronds blancs, d'une sorte de halos.

À l'intérieur, l'on trouve tout un monde, à boire et à manger : sous un firmament (à proprement parler) de nacre, les cieux d'en dessus s'affaissent sur les cieux d'en dessous, pour ne plus former qu'une mare, un sachet visqueux et verdâtre, qui flue et reflue à l'odeur et à la vue, frangé d'une dentelle noirâtre sur les bords.

Parfois, très rare, une formule perle à leur gosier de nacre, d'où l'on trouve aussitôt à s'orner.

Francis Ponge

Dans «L’Huître» de Francis Ponge, l’huître est présentée comme un monde opiniâtrement clos, une apparence rugueuse dissimulant une richesse intérieure insoupçonnée.

Dans ce projet, je souhaite mettre en lumière la dualité de l’apparence extérieure et de la richesse intérieure. Tout comme l’huître, dont la coque rugueuse et terne dissimule dans son entre nacrée une perle précieuse, l’être humain peut abriter des trésors souvent méconnus, le geste des métiers d’artisanat.

Une partie essentielle de cette exploration réside dans la comparaison entre les mains des travailleurs et l’huître. Ces mains sont marquées par le dur labeur et l’expérience et abrite un geste précieux qui donne naissance à de multiple «perles». Tout comme Ponge décrit le processus laborieux d’ouverture de l’huître, avec ses mains meurtries et les coupures sur les doigts, mon projet évoque les mains des travailleurs, usées par le labeur mais capables de créer des merveilles.